Le CESER a examiné le Budget prévisionnel 2018 de la Région. Malgré la volonté affichée de s’inscrire dans la continuité des engagements pris en 2016, les incertitudes sur l’avenir de la formation professionnelle et le pilotage de l’apprentissage ainsi que les contraintes nouvelles imposées aux budget des collectivités pèsent sur ce projet de Budget.
Vous lirez ci-dessous l’intervention de la FSU.
Budget Primitif 2018
Mission III
Intervention de Jean-Marc CLERY – FSU
En retrait de près de 90M€ par rapport à 2017, le budget régional pour 2018 se place donc bel et bien sous le signe des incertitudes que les Orientations budgétaires avaient identifiées. La Région affiche certes sa volonté de se projeter vers l’avenir en maintenant les grands axes de ses engagements – convaincue que la trajectoire budgétaire choisie la classera parmi les ‘bons élèves’ et lui permettra de ne pas avoir à souffrir des contraintes nouvelles imposées par l’État. Mais les incertitudes demeurent fortes, et le CESER s’avance un peu en parlant d’un Budget serein.
Ces incertitudes sont particulièrement fortes en matière d’Orientation et de Formation professionnelles, et le CESER en a souligné les effets sur la Mission 3. Plus généralement, on les mesure au nouveau tour de vis donné à la réduction des dépenses de fonctionnement (-1,3 % sur l’ensemble du Budget). Certains s’en féliciteront peut-être, mais pas la FSU, car derrière l’impératif abstrait de la « recherche d’efficience » ce seront des difficultés bien réelles qui seront ressenties dans de nombreux secteurs d’intervention de la Région.
S’agissant de la Mission 3, une fois n’est pas coutume, la FSU n’a pas voulu marquer d’opposition à l’avis du CESER sur le programme 301 qui développe les orientations du CPRDFOP. Certes il y a encore bien des réserves à faire sur la volonté de faire du SPRO un « service universel accessible à tous », comme sur la tendance de la Région à ‘embarquer’ dans le CEP les Psy-EN EDO et les CIO qui ne relèvent, rappelons-le, que de l’État. Mais l’idée d’une Orientation à deux branches avec une vraie spécificité des publics scolaires et étudiants semble avoir fait son chemin, et c’est une bonne chose ; les multiples interventions de la FSU à ce sujet n’y ont sans doute pas été pour rien.
La FSU a également choisi de ne pas s’opposer à l’avis du CESER sur le programme 312 consacré à l’apprentissage. Qu’on se rassure, notre opposition bien connue à la politique de développement de l’apprentissage reste la même. Nous continuons à dénoncer l’objectif affiché des 20 000 apprentis en l’absence de toute réelle évaluation du point de vue de l’amélioration de la qualification des jeunes. De même que nous dénonçons l’avalanche d’aides à l’accueil des apprenti-e-s dont bénéficient les entreprises sans réelle conditionnalité. Dans son avis sur le programme 313 le CESER s’est d’ailleurs ému à juste raison de l’inefficacité des incitations financières pour la promotion de l’égalité de genre ; mais il a omis de s’interroger sur les quelque 271k€ de fonds libres du quota de la TA réaffectés en 2017 « vers des CFA en difficultés », cela sans que soient explicitées lesdites difficultés. Une aide bien généreuse, à comparer à la réduction de 1% de la DGF qui sera imposée aux lycées publics qui, eux, sont considérés « en bonne santé financière » par la Région. De même, la FSU juge parfaitement déséquilibré le projet d’une « sensibilisation à l’apprentissage des personnels enseignants en collège et en lycée » alors qu’aucune initiative d’envergure n’a été entreprise pour les formations de la voie professionnelle publique.
Pour autant, la FSU reconnaît que l’avis du CESER sur ce programme a le mérite de faire porter l’accent sur les attentes des jeunes et sur la qualité de la formation. De même, la FSU entend la volonté de la Région de défendre une carte des formations portée par une volonté politique de développement des qualifications et d’équilibre des territoires, à rebours des appétits de ceux qui, actuellement, agissent pour que l’arbitrage gouvernemental penche en faveur d’un ‘’marché’’ de la formation et de l’apprentissage totalement concurrentiel. Seulement, en prétendant concilier demande des entreprises et besoin de formation de la jeunesse, la politique régionale reste condamnée à frustrer sans cesse les appétits des premiers sans répondre véritablement aux vrais besoins des seconds. Mais après tout, il ne tient qu’à elle de franchir le pas et de choisir une bonne fois de faire des lycées technologiques et professionnels publics de l’Éducation nationale, de l’agriculture et de l’enseignement maritime, le véritable levier de sa politique de formation professionnelle.
S’agissant de la politique en direction des lycées qui est le gros morceau de la Mission 3, sans revenir sur la décision de fermeture du LP de Plouhinec qui constitue selon nous une erreur politique, la FSU est globalement en accord avec les avis du CESER.
La volonté de la Région de poursuivre son effort budgétaire pour adapter le cadre bâti des lycées est positive. Surtout on perçoit pour la première fois une démarche très structurée dans la programmation des interventions. C’est une bonne chose, mais on a tellement tardé à mettre en place une véritable stratégie immobilière, et l’état du parc des lycées publics est aujourd’hui si dégradé, que les interventions actuelles apparaissent totalement décalées au regard des besoins.
Pour ce qui est du fonctionnement des lycées, la FSU note la volonté de la Région d’engager un autre type de dialogue avec les établissements. Il n’y a pas de motif d’y être a priori défavorable, à condition de savoir ce que cela recouvre. Par contre, la FSU est nettement moins favorable que le CESER à l’instauration de ‘’contrats d’objectifs tripartites’’ avec l’académie et les EPLE, car l’organisation pédagogique relève de la politique nationale déclinée par les établissements dans le cadre de leur autonomie. Mais surtout, dans l’immédiat, ce qu’on voit, c’est qu’en fait de ‘’dialogue de gestion renouvelé’’, les lycées publics vont devoir subir une baisse notable de leur DGF – tout comme on lit entre les lignes que les dotations en personnels dans les EPLE risquent bien de faire l’objet d’une révision drastique. On a connu meilleure façon d’engager le dialogue !
La FSU apprécie également l’avis du CESER sur l’Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR), avis développé et précis qui a le mérite cette fois de poser avec clarté les questions – que ce soit en matière d’engagement budgétaire de la Région ou bien de sa stratégie vis-à-vis de la structuration régionale des établissements. Sur ce dernier point, il est vrai que jusqu’ici la Région a été des plus silencieuses sur ce qu’on peut appeler l’échec annoncé de l’UBL, superstructure dont le dimensionnement et la gouvernance laissait pourtant d’emblée deviner les limites à court terme. Le questionnement sur le redéploiement annoncé d’une partie des bourses de thèse est également très pertinent.
La FSU regrette en revanche que l’avis du CESER se concentre essentiellement sur l’attractivité du territoire pour la recherche de haut niveau, dans une logique de concurrence dans laquelle la FSU ne se reconnaît pas. La FSU regrette surtout qu’on minore l’enjeu de l’amélioration des conditions d’accueil des étudiants, précisément au moment où le premier cycle universitaire est confronté, en Bretagne comme ailleurs, à l’onde de choc de la croissance des effectifs lycéens.
Croissance majeure des effectifs et arrivée de nouveaux publics, faiblesse des taux d’encadrement avec un manque chronique de postes titulaires : tous les ingrédients sont réunis pour une massification chaotique du supérieur, source d’échecs et de frustrations pour la jeunesse. Au-delà du soutien à la recherche et des programmes d’excellence, il y a là un enjeu majeur pour la politique régionale qu’il ne faut pas sous-estimer.