Intervention de Jean Luc LE GUELLEC -FSU-

 

Le projet de contribution au débat national sur le nouvel acte de décentralisation élaboré par le conseil régional s’inscrit dans la perspective de la future loi décentralisation-réforme de l’Etat. La contribution de la Région Bretagne converge, pour une part, avec les conclusions du dernier congrès de l’Association des Régions de France (ARF) tout en ayant, d’autre part, des préconisations très spécifiques.

La Région Bretagne revendique fortement de jouer un rôle de chef de file du développement économique et de l’innovation avec un poids important dans la future banque publique d’investissement (BPI). Sur le rôle et les missions de cette future BPI, la FSU réclame, avec le collectif « Pour un pôle public financier », l’ouverture d’un débat national. La focalisation du débat sur le seul niveau territorial de gouvernance de cette BPI occulte les véritables enjeux.

Concernant l’autonomie fiscale revendiquée, la FSU estime qu’elle est de nature à favoriser la concurrence entre les territoires et accentuer les inégalités entre les citoyens devant l’impôt. Comment, à la fois, se plaindre du dumping social et environnemental aux échelles mondiale et européenne et envisager d’en favoriser le développement entre régions de France ? En tout état de cause, la FSU revendique la nécessité de mise en œuvre de véritables péréquations assurées par la collectivité nationale.

Nous ne développerons pas, ici, toutes les raisons de l’opposition de la FSU au transfert de la totalité des attributions en matière de formation professionnelle et d’accompagnement vers l’emploi. Nous nous limiterons à deux problématiques pour lesquelles la région Bretagne à une forte spécificité et où le conseil régional est très « demandeur » : le SPOR et les langues régionales.

La perspective d’un service public régional de l’orientation est un point fort de la contribution du conseil régional et, sur ce dossier, la FSU a un désaccord important. S’il nous semble acquis que les conseillers d’orientation psychologues garderont leur statut, la question du transfert des missions reste posé. Le grand danger, pour la FSU, est la confusion entre les publics scolaires et celui des adultes en recherche d’emploi. Le pilotage par les Régions de l’orientation scolaire va faire prévaloir la logique d’insertion sur toute autre considération. Au-delà des démentis, les arguments qui sont avancés pour le transfert total de l’orientation aux régions insistent sur le lien avec le tissu économique local et l’anticipation des compétences sur le territoire, jamais il n’est vraiment question de la spécificité des jeunes scolarisés ni des projets d’étude et de vie des adolescents qui se construisent très progressivement sans être prédéterminés par le choix précoce d’un métier. On nous jure qu’il ne s’agit pas d’adéquationisme mais dès qu’on passe aux « travaux pratiques », les actions déclinées portent, pour l’essentiel, sur l’information aux métiers et, si possible, dès le plus jeune âge. Sans compter, qu’on insiste beaucoup sur les métiers localement « en tension ». La conséquence de ce type de choix sera l’amplification d’une réalité déjà constatée : les jeunes issus des milieux défavorisés resteront collés au territoire quand les autres, plus mobiles, pourront envisager, ailleurs, des études plus longues.

Une autre demande du conseil régional porte sur une expérimentation dans le domaine linguistique. La politique linguistique et culturelle volontariste de la région est louable, la FSU Bretagne l’a régulièrement acté dans ses interventions. Nous devons, pour autant, rappeler notre opposition au désengagement de l’État vis-à-vis du service public d’éducation.

La FSU demande donc que l’Etat réaffirme dans les principes et dans les actes le rôle du service public d’Education pour l’enseignement bilingue, l’enseignement de et ou en langue vivante et l’enseignement optionnel des langues régionales.

Le service public a vocation à accueillir tous les jeunes. Il doit donc être en mesure d’offrir à tous les élèves la possibilité d’une scolarité dans une filière bilingue, de la maternelle au baccalauréat, proche du domicile et dans de bonnes conditions pédagogiques, égales pour tous sur tout le territoire. Cela suppose que les recrutements soient revus à la hausse et que les formations initiale et continue soient de qualité. L’Etat doit s’en donner les moyens, y compris par la mise en place de pré-recrutements.

La FSU n’est pas opposée à un partage des compétences entre l’Etat et les régions sous certaines conditions :

- l’Etat doit rester maître d’œuvre du recrutement, de la formation initiale et continue, de la gestion des enseignants (affectation, carrières) ainsi que des programmes.
- L’Etat doit reconnaître les langues régionales comme des langues à part entière, traitées comme telles (horaires, programmes et épreuves nationales).

- L’implantation des sections bilingues, enseignements optionnels et langues vivantes dans le premier et le second degrés pourrait relever d’une concertation entre l’Etat et les collectivités territoriales.

Les différentes instances paritaires de concertation doivent être consultées obligatoirement comme pour l’expression des besoins en recrutement. La FSU combattra toute carte scolaire établie dans une optique de complémentarité public-privé.

En tout état de cause, la FSU Bretagne considère qu’une loi-cadre est nécessaire pour sécuriser la situation des langues régionales notamment dans le service public d’éducation. Elle demande aussi que ces langues soient prises en compte dans la future loi d’orientation sur l’école.