Très tôt après le vote du Royaume Uni, Jean-Yves Le Drian, Président du Conseil régional a saisi le CESER pour une étude sur l’impact possible du Brexit pour la Bretagne. Le travail réalisé a été présenté au plénier du CESER avant d’être remis à la Région.

La FSU a salué la qualité de cette étude qui ne dresse pas de pronostics mais se limite à cartographier les secteurs exposés, cela dans un contexte qui demeure bien flou quant aux modalités et aux conséquences de ce Brexit.

La FSU n’a pas manqué de faire le parallèle entre la réactivité au Brexit de la part de l’exécutif régional et le silence de celui-ci quant à l’impact prévisible des traités transatlantiques pourtant fort dangereux pour l’économie, la santé et l’environnement en Bretagne.

Les collectifs bretons STOP Tafta-Ceta, très actifs, mèneront des actions à l’occasio de la session du Conseil régional. Plus de précisions prochainement sur notre site.

Intervention de Jean-Marc CLERY – FSU

La FSU félicitera tout d’abord l’ensemble des rédactrices et rédacteurs de ce très riche rapport sur les Enjeux du Brexit pour la Bretagne, et notamment les membres du groupe des Correspondants Europe qui en ont assuré la conduite. Compte-tenu des délais très courts, le vaste panorama proposé ici est remarquable. La FSU apprécie d’autant plus la qualité de ce travail, précis et nuancé, qu’elle avait eu, au départ, quelques doutes quant aux attendus et aux finalités de la saisine.

En dehors de la cartographie des risques et des analyses sectorielles proposées dans ce rapport, ce qui domine ici c’est tout de même la très grande incertitude dans laquelle nous sommes encore quant aux principaux effets à attendre du Brexit – cela aussi bien au plan monétaire que réglementaire ou tarifaire, ou encore des investissements et des échanges. Difficile par conséquent de se placer dans une démarche d’anticipation quand la portée et la nature exacte des changements ne peuvent être appréciées.

Au-delà de cette première observation, la FSU relève deux limites, certes relatives, à ce rapport. Premièrement, mais c’est évidemment un effet de perspective, on passe parfois un peu vite de l’échelon régional, voire interrégional, à l’échelon européen. Or, entre la modeste région Bretagne et l’Europe ou le vaste monde, il existe tout de même l’échelon national, et il n’est tout de pas inactif ni sans ressources, que ce soit pour peser dans les prochaines négociations avec le Royaume-Uni ou pour faire face aux différents aléas auxquels la Bretagne pourrait être confrontée.

Seconde limite selon nous, c’est la place assez modeste qui est faite aux coopérations. Il en est certes fait mention, notamment dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche, mais c’est avant tout en tant que point de vigilance quant aux financements. Il est dommage qu’en réponse à la logique purement utilitariste du Royaume-Uni post- (et pré-) Brexit, on n’essaie pas davantage d’explorer les possibilités de coopérations nouvelles et d’entraide en Europe.
S’il note à juste raison que l’expérience du Brexit doit interroger l’Europe dans son fonctionnement et ses orientations – bien davantage que des objectifs de coopération, ce rapport met presque exclusivement en avant les risques et les opportunités à attendre dans un cadre de concurrence accrue, cela non seulement entre le Royaume-Uni et l’Europe, mais aussi entre les « partenaires » européens eux-mêmes.

De cette observation on en tirera cette autre, guère réjouissante, que les institutions européennes n’ont décidément guère œuvré à surmonter la logique de profit et les confrontations agressives qui en découlent. Bien au contraire, celles-ci ont été exacerbées sous le double effet, d’une part, du principe de la « concurrence libre et non faussée » qui a livré à la seule loi du marché nombre de secteurs économiques stratégiques – minant ainsi les possibilités de régulations par les Etats – et, d’autre part, d’un « pacte budgétaire » mortifère pour la majeure partie des économies de la zone euro.

De ce point de vue, et même s’il y a incontestablement une ambiguïté du vote en faveur du Brexit, il est clair que, derrière le paravent du rejet des migrants et par delà les faux-semblants du débat, les ultra-libéraux-agressifs qui ont animé la campagne pour le Brexit, tout comme les ulra-libéraux-gouvernementaux, leurs adversaires sur le papier, partagent la même volonté de pousser un peu plus loin cette logique du marché.

Singulièrement, les responsables politiques européens n’ont pourtant pas hésité à emboîter le pas des faiseurs d’opinion pour rapprocher le Brexit d’une autre mobilisation, pourtant diamétralement opposée, celle des citoyens européens et du parlement de Wallonie contre l’accord de libre-échange Euro-Canadien. Ainsi sous le dénominateur commun du « refus de l’unité européenne » ou encore de l’éternel combat, quasiment métaphysique, entre « l’ouverture » et « le repli sur soi », a-t-on tenté benoîtement d’enfumer l’opinion.

La réalité de la mobilisation des collectifs STOP-Tafat/Ceta est pourtant bien connue, et elle est tout autre : depuis des mois, des collectifs citoyens ont animé le débat public et n’ont n’ont cessé de demander des informations et des éclairages précis sur la préparation de cet accord, tant au plan national qu’au niveau des institutions européennes. Cette activité militante où sont impliqués des associations, des partis, des syndicats, a produit une véritable expertise citoyenne sur des questions essentielles touchant l’agriculture, la santé, l’environnement, etc.

Qu’on permette donc à la FSU de plaider une fois encore pour que, dans notre région où les instances de débat démocratique jouissent d’une grande vitalité et d’une grande crédibilité, une réflexion collective puisse être menée par les représentants de la société civile organisée, avec la même qualité et le même approfondissement des questions que l’excellent rapport qui vient de nous être présenté.