« Ouvrir l’espace public à l’engagement pluriel des jeunes », cette deuxième partie du rapport du CESER sur les « univers sociaux et culturels des jeunes en Bretagne » nous donne, une nouvelle fois, une analyse riche s’appuyant sur des travaux de chercheurs comme, par exemple, l’étude d’Olivier David sur la « place des jeunes dans l’espace public ». Les préconisations faites au conseil régional sont nombreuses et la FSU y souscrit pour la plupart.
Quelques remarques complémentaires cependant. Il est juste de dire que le modèle traditionnel du « militant affilié » n’attire plus beaucoup les jeunes. Pour autant, des organisations partisanes de jeunes existent : jeunes populaires, jeunes communistes, jeunesse ouvrière chrétienne, jeunes socialistes, jeunes verts etc.…Même peu représentatives, nous aurions tort de les considérer comme réalité négligeable et peu démocratique de ne pas les prendre en compte. De la même façon des organisations syndicales d’étudiants et de lycéens existent. Si le mouvement syndical étudiant est depuis longtemps reconnu, tel n’est toujours pas le cas du fait syndical lycéen. Le reconnaître, en donnant, aux organisations syndicales lycéennes les possibilités d’exercer, dans un cadre réglementaire, leurs activités au sein du lycée serait une avancée démocratique.
Il est vrai, comme il est dit dans l’étude, que les nouveaux modes d’engagement des jeunes « sont le reflet d’un autre rapport à l’agir politique, plus intermittent, mais aussi plus direct et protestataire ». C’est la raison pour laquelle les pouvoirs publics et les institutions doivent considérer comme de réels interlocuteurs les organisations, mêmes éphémères, dont les jeunes se dotent lors d’un mouvement social. Souvent émergent des « collectifs » ou des « coordinations ».
L’engagement est effectivement pluriel mais l’affirmation selon laquelle le « pragmatisme » aurait supplanté « l’idéologie » mérite discussion. Les jeunes, en Bretagne, comme ailleurs quand ils se mobilisent le font, certes, avec des objectifs précis mais articulés à un ensemble cohérent de valeurs. D’ailleurs dans le texte « regardez nous comme une chance » du « message des jeunes ATD-Quart Monde », on peut y lire l’affirmation de principes, d’exigences et de valeurs qui sont en cohérence. Si l’on ne prend pas le mot dans son sens péjoratif, il y a bien là idéologie et c’est tant mieux.
Le danger qui guette, aussi, les pouvoirs publics et institutions est de chercher soit à nier la conflictualité dans l’action collective des jeunes soit à nier la sincérité de leur engagement par le soupçon de manipulation. Je me permets de citer un extrait d’un monument d’anthologie du député Bernard Debré lors du mouvement des retraites (séance de questions au gouvernement, le 19 octobre 2010). : « Des grévistes expérimentés bloquent les raffineries et les dépôts d’essence. La France souffre. Mais voici que certains lycéens sont dans la rue. Quelles sont leurs motivations, eux qui prendront leur retraite dans cinquante ans alors que la durée de vie à cette époque, sera de quatre vingt dix à cent ans ? Comment se fait-il que des lycéens soient si vieux si jeunes, pendant que la jeunesse du monde entier travaille, participe à cette compétition mondiale, à la guerre économique que se livrent tous les pays ? (…) Ne sont-ils pas intoxiqués… ? ». Sans commentaire.